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Publié le 04/06/2020 6 minutes de lecture
Au cours des derniers mois, nous avons dû apprendre à vivre dans un monde sans voyage où seul notre environnement immédiat devait satisfaire nos envies d’aventure, de découverte et d’exploration. Si, depuis peu, de nombreux pays cherchent à rouvrir leurs frontières, les entreprises du monde entier reprennent leurs activités avec précaution et les compagnies aériennes cherchent à remplir leurs avions à tout prix en vue de la saison estivale, les voyages reprendront-ils pour autant au même rythme qu’avant? Plus important encore, devraient-ils reprendre au même rythme qu’avant? Le confinement aura eu le mérite de nous amener à réfléchir sur certains privilèges que nous pensions acquis et à nous demander s’il n’était pas temps d’opérer certains changements dans nos modes de vie. Du goût retrouvé pour une certaine forme de solitude à la diminution sans précédent de la pollution au niveau mondial, voyons comment les leçons que nous avons tirées du confinement pourraient modifier à jamais nos habitudes en matière de voyage.
Leçon n°1: savoir se satisfaire d’un seul endroit
Rares sont les personnes pour lesquelles le confinement aura été synonyme de zen et de plénitude ou qui se seront pleinement contentées d’un monde réduit aux quelques mètres carrés de leur séjour. Pourtant, alors que les journées à être enfermés passaient, nous avons tous su nous accommoder de cette vie prolongée entre quatre murs. Mais alors, que va-t-il advenir de nos périples où, tels des nomades, nous enchaînions les destinations avec notre sac à dos? Qu’en sera-t-il de nos escapades citadines où l’on courait de sites en sites ou encore de ces voyages épiques pour rallier certains des lieux mythiques inscrits sur notre agenda de baroudeur? D’après Shobha Mohan, fondateur de RARE India, qui s’exprimait dans un article de CN Traveller, «nous verrons désormais moins de monde passer d’un site à un autre, les gens resteront plus longtemps au même endroit, à la recherche de lieux moins touristiques».

Leçon n°2: savoir lever le pied
Le fait de parcourir de longues distances en peu de temps (le propre du voyage, au fond) donne à nos vies un rythme plus effréné, plus soutenu. Mais le confinement nous a appris ce qu’était de devoir brusquement lever le pied, de prendre chaque jour comme il vient, et d’avoir… du temps! Oui, du temps! Cela signifie-t-il que nous serons plus nombreux à adopter le slow travel? Il est possible en tous cas que nous prenions plus de temps pour organiser nos vacances et que nous laissions tomber ces escapades improvisées à la dernière minute pour le week-end, qui, avant, nous semblaient normales. Dans un récent entretien avec Vox, Rafat Ali, Directeur général de Skift, déclarait qu’«il faudrait longtemps avant que la demande [touristique] ne redevienne comme avant».Maintenant que nous nous sommes habitués à avoir des occupations nettement moins variées et un rythme de vie beaucoup plus paisible, il y a peu de chance pour que nous ayons envie de reprendre immédiatement notre course folle aux voyages. Il est plus probable que l’on opte désormais pour des virées pas trop loin de chez nous plutôt que pour l’achat en ligne d’un vol de nuit à destination d’un pays lointain. Tony Wheeler, co-fondateur de Lonely Planet, est également persuadé de la profonde métamorphose que s’apprête à connaître le tourisme. «Nous ne sommes pas près de reprendre nos vieilles habitudes. Les gens risquent désormais y réfléchir à deux fois avant de décider de partir en week-end à la dernière minute dans un autre pays d’Europe» déclarait-il récemment dans un entretien avec le Financial Times.
Leçon n°3: apprendre à explorer la nature qui nous entoure
Pour les personnes restées confinées, les espaces verts sont devenus de véritables havres naturels, voire des bouées de sauvetage pour celles n’ayant ni jardin, ni terrasse ou balcon. Depuis que nos libertés ont été restreintes, nos sorties contrôlées et que nos possibilités de prendre un bol d’air frais ont été méchamment réduites, nous apprécions d’autant plus la nature qui nous entoure. Sur Instagram et Twitter, on ne compte plus les photos publiées des endroits en ville où la nature dévoile sa beauté, que ce soit dans les clairières des forêts municipales, sur les promenades en bord de rivière ou dans les petits parcs, et que l’on avait jamais pris la peine d’aller découvrir.

Leçon n°4: mieux apprécier le voyage
Avoir la possibilité de partir en voyage est indéniablement un luxe. Si voyager fait partie intégrante de la vie de nombreuses personnes, tout comme compter à rebours les jours avant le prochain départ, le fait de pouvoir sauter dans un avion, un train ou de prendre une voiture et de partir à la découverte d’une autre culture en quelques heures reste une expérience vraiment très privilégiée. Le fait d’avoir été contraints de mettre nos projets de globe-trotter à l’arrêt nous a permis de voir enfin le voyage pour ce qu’il est vraiment, à savoir un cadeau! Cette prise de conscience nous permettra peut-être d’apprécier désormais chacune de nos excursions à sa juste valeur, qu’il s’agisse d’une virée en voiture ou de vacances sur un autre continent, et de comprendre à quel point voyager est une chance et non un dû.

Leçon n°5: apprendre à réduire notre incidence sur la planète
Avec le ralentissement sans précédent de la surconsommation humaine, dont même le plus fervent défenseur de l’environnement n’aurait jamais osé rêver, une situation inédite s’est produite: dans de nombreuses métropoles du globe, les niveaux de pollution et de fréquentation n’ont jamais été aussi bas. La plupart des compagnies aériennes ont réduit leurs vols de manière drastique, quand elles n’ont pas tout simplement maintenu leurs équipages au sol, et la nature, plantes et animaux confondus, a doucement repris ses droits dans des lieux qu’elle avait jusqu’alors désertés.Après des mois de confinement, l’un des changements les plus positifs qui pourraient advenir dans notre rapport au voyage serait certainement de voir le tourisme responsable et respectueux de l’environnement se hisser au rang de nos priorités. Peut-être que nous serons davantage enclins à choisir des séjours plus écoresponsables, à moins prendre l’avion ou le bateau, ou encore à compenser notre empreinte carbone. «Je pense que les road-trips vont exploser, surtout cet été. Il y aura certainement comme un contre-coup à la crise du coronavirus car les gens auront peur des grandes foules et des aéroports» explique Jessica Nabongo, fondatrice de Jet Black, dans un entretien avec Vox. Nous chercherons très certainement à savoir comment avoir une incidence positive sur nos destinations. Alors que de nombreux pays subissent de plein fouet les conséquences de la chute du tourisme, nous réfléchirons peut-être aussi davantage, lorsque nous réserverons nos vacances, à la manière dont notre argent sera redistribué, en veillant à ce qu’il profite vraiment aux gens qui en ont le plus besoin.
Leçon n°6: rester proche de ceux que l’on aime malgré l’éloignement
Le confinement et les mesures de distanciation sociale ont eu sur de nombreuses familles du monde entier des conséquences très douloureuses. Au cours des derniers mois, l’unique possibilité qui nous était offerte pour être en contact avec nos proches et amis était d’avoir recours à la technologie, au détriment des interactions physiques qui tissaient jusque-là notre quotidien. Ces séparations sur le long terme auront-elles également des conséquences sur nos habitudes en matière de voyage?

Traduit par : Maud Combier Perben